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mardi 12 décembre 2017

LETTRE DE SIMONE WEIL à DEODAT ROCHE

Simone Weil                        

Philosophie cathare

Lettre de Simone Weil à Déodat Roché



Note biographique

IMONE WEIL est née à Paris en 1909 dans une famille juive cultivée. Son père était médecin. Elève d’Alain, elle devient agrégée et professeur de philosophie. Elle milite dans le mouvement anarchiste et se fait
Simone WEIL, 1909 - 1943
Simone WEIL, 1909 - 1943
remarquer par son action politique et syndicale. Elle décide de partager le sort commun des hommes et travaille en usine de 1934 à 1935. Elle s’engage, en 1936, aux côtés des républicains dans la guerre civile d’Espagne. Elle dénonce l’Eglise catholique, ses excès passés et son blocage présent. Elle écarte la tradition juive (par rejet du méchant dieu biblique) au profit de la culture grecque idéalisée.

L’occupation de Paris, en juin 1940, lui fait gagner Marseille où elle rencontre le père Perrin avec qui elle approfondit la révélation chrétienne. Ouvrière agricole en Ardèche, elle poursuit sa découverte du Christ avec Gustave Thibon. Tandis que sa famille a trouvé refuge aux Etats-Unis, elle gagne Londres où elle travaille dans l’administration de la « France libre ». Malade, elle se laisse peu à peu mourir de faim en 1943.
Les écrits historiques forment une première leçon où le nazisme est vu comme une maladie de l’âme. Les écrits politiques donnent une deuxième leçon qui concerne la condition ouvrière. Les écrits spirituels constituent la troisième leçon. Ils datent des trois dernières années de sa vie. Dans les lettres au père Perrin, Simone Weil fait état de sa rencontre avec le Christ dans le seul à seul de l’expérience mystique.






La pesanteur et la grâce

Extraits
« Un mode de purification : prier Dieu, non seulement en secret par rapport aux hommes, mais en pensant que Dieu n’existe pas. » (Renoncement au temps)
« L’humilité a pour objet d’abolir l’imaginaire dans le progrès spirituel. Aucun inconvénient à se croire beaucoup moins avancé qu’on n’est : la lumière n’en opère pas moins son effet, dont la source n’est pas dans l’opinion. Beaucoup à se croire plus avancé, car alors l’opinion a un effet. » (Illusions)
« Dieu et le surnaturel sont cachés et sans forme dans l’univers. Il est bon qu’ils soient cachés et sans nom dans l’âme. Autrement, on risque d’avoir sous ce nom de l’imaginaire (ceux qui ont nourri et vêtu le Christ ne savaient pas que c’était le Christ). Sens des mystères antiques. Le christianisme (catholiques et protestants) parle trop de choses saintes. » (Ibid.)
« Amour imaginaire pour les créatures. On est attaché par une corde à tous les objets d’attachements, et une corde peut toujours se couper. On est aussi attaché par une corde au Dieu imaginaire, au Dieu pour qui l’amour est aussi un attachement. Mais au Dieu réel on n’est pas attaché, et c’est pourquoi il n’y a pas de corde qui puisse être coupée. Il entre en nous. Lui seul peut entrer en nous. Toutes les autres choses restent en dehors, et nous ne connaissons d’elles que les tensions de degré et de direction variables imprimées à la corde quand il y a déplacement d’elles ou de nous. » (Amour)
« Il faut que le mal soit rendu pur — ou la vie est impossible. Dieu seul peut cela. C’est l’idée de la Gîta. C’est aussi l’idée de Moïse, de Mahomet, de l’hitlérisme… Mais Jéhovah, Allah, Hitler sont des dieux terrestres. La purification qu’ils opèrent est imaginaire. » (Le mal)
« La non-violence n’est bonne que si elle est efficace. Ainsi, question du jeune homme à Gandhi concernant sa sœur. La réponse devrait être : use de la force, à moins que tu ne sois tel que tu puisses la défendre avec autant de probabilité de succès, sans violence. A moins que tu ne possèdes un rayonnement dont l’énergie (c’est-à-dire l’efficacité possible, au sens le plus matériel) soit égale à celle contenue dans tes muscles. S’efforce de devenir tel qu’on puisse être non-violent. » (La violence)
« Cas de contradictoires vrais. Dieu existe, Dieu n’existe pas. Où est le problème ? Je suis tout à fait sûre qu’il y a un Dieu, en ce sens que je suis tout à fait sûre que mon amour n’est pas illusoire. Je suis tout à fait sûre qu’il n’y a pas de Dieu, en ce sens que je suis tout à fait sûre que rien de réel ne ressemble à ce que je peux concevoir quand je prononce ce nom. Mais cela que je ne puis concevoir n’est pas une illusion. » (L’athéisme purificateur)
« Entre deux hommes qui n’ont pas l’expérience de Dieu, celui qui le nie en est peut-être le plus près. Le faux Dieu qui ressemble en tout au vrai, excepté qu’on ne le touche pas, empêche à jamais d’accéder au vrai. Croire en un Dieu qui ressemble en tout au vrai, excepté qu’il n’existe pas, car on ne se trouve pas au point où Dieu existe. » (Ibid.)
« La religion en tant que source de consolation est un obstacle à la véritable foi : en ce sens l’athéisme est une purification. Je dois être athée avec la partie de moi-même qui n’est pas faite pour Dieu. Parmi les hommes chez qui la partie surnaturelle d’eux-mêmes n’est pas éveillée, les athées ont raison et les croyants ont tort. » (Ibid.)
« L’attention absolument sans mélange est prière. » (L’attention et la volonté)
« Le poète produit le beau par l’attention fixée sur du réel. De même l’acte d’amour. Savoir que cet homme, qui a faim et soif, existe vraiment autant que moi — cela suffit, le reste suit de même. Les valeurs authentiques et pures de vrai, de beau et de bien dans l’activité d’un être humain se produisent par un seul et même acte, une certaine application à l’objet de la plénitude de l’attention. » (Ibid.)
« Méthode pour comprendre les images, les symboles, etc. Non pas essayer de les interpréter, mais les regarder jusqu’à ce que la lumière jaillisse. D’une manière générale, méthode d’exercer l’intelligence, qui consiste à regarder. Application de cette méthode pour la discrimination du réel et de l’illusoire. Dans la perception sensible, si on n’est pas sûr de ce qu’on voit, on se déplace en regardant, et le réel apparaît. Dans la vie intérieure, le temps tient lieu d’espace. Avec le temps on est modifié et si, à travers les modifications, on garde le regard orienté vers la même chose, en fin de compte l’illusion se dissipe et le réel apparaît. La condition est que l’attention soit un regard et non un attachement. » (Ibid.)
« La connaissance de la misère humaine est difficile au riche, au puissant, parce qu’il est presque invinciblement porté à croire qu’il est quelque chose. Elle est également difficile au misérable parce qu’il est presque invinciblement porté à croire que le riche, le puissant est quelque chose. » (Ibid.)
« Ce n’est pas la faute qui constitue le péché mortel, mais le degré de lumière qui est dans l’âme quand la faute, quelle qu’elle soit, est accomplie. » (Ibid.)
« Il n’y a pas d’autre critérium parfait du bien et du mal que la prière intérieure ininterrompue. Tout ce qui ne l’interrompt pas est permis, tout ce qui l’interrompt est défendu. Il est impossible de faire du mal à autrui quand on agit en état de prière. A condition que ce soit prière véritable. Mais avant d’en arriver là, il faut avoir usé sa volonté propre contre l’observation des règles. » (Dressage)
« Le rationnel au sens cartésien, c’est-à-dire le mécanisme, la nécessité humainement représentable, doit être supposé partout où on le peut, afin de mettre en lumière ce qui lui est irréductible. L’usage de la raison rend les choses transparentes à l’esprit. Mais on ne voit pas le transparent. On voit l’opaque à travers le transparent, l’opaque qui était caché quand le transparent n’était pas transparent. On voit ou les poussières sur la vitre, ou le paysage derrière la vitre, mais jamais la vitre elle-même. Nettoyer la poussière ne sert qu’à voir le paysage. La raison ne doit exercer sa fonction que pour parvenir aux vrais mystères, aux vrais indémontrables qui sont le réel. L’incompris cache l’incompréhensible, et pour ce motif doit être éliminé. » (L’intelligence et la grâce)
« Le nettoyage philosophique de la religion catholique n’a jamais été fait. Pour le faire, il faudrait être dedans et dehors. » (Ibid.)
« La conscience est abusée par le social. L’énergie supplémentaire (imaginative) est en grande partie suspendue au social. Il faut l’en détacher. C’est le détachement le plus difficile. La méditation sur le mécanisme social est à cet égard une purification de première importance. Contempler le social est une voie aussi bonne que se retirer du monde. C’est pourquoi je n’ai pas eu tort de côtoyer si longtemps la politique. » (Le gros animal)
« Le christianisme primitif a fabriqué le poison de la notion de progrès par l’idée de la pédagogie divine formant les hommes pour les rendre capables de recevoir le message du Christ. Cela s’accordait avec l’espoir de la conversion universelle des nations et de la fin du monde comme phénomènes imminents. Mais aucun des deux ne s’étant produit, au bout de dix-sept siècles on a prolongé cette notion de progrès au-delà du moment de la Révélation chrétienne. Dès lors elle devait se retourner contre le christianisme. Les autres poisons mélangés à la vérité du christianisme sont d’origine juive. Celui-là est spécifiquement chrétien. La métaphore de la pédagogie divine dissout la destinée individuelle qui seule compte pour le salut, dans celle des peuples. Le christianisme a voulu chercher une harmonie dans l’histoire. C’est le germe de Hegel et de Marx. La notion d’histoire comme continuité dirigée est chrétienne. Il me semble qu’il y a peu d’idées plus complètement fausses. Chercher l’harmonie dans le devenir, dans ce qui est le contraire de l’éternité. Mauvaise union des contraires. L’humanisme et ce qui s’est ensuivi n’est pas un retour à l’Antiquité, mais un développement de poisons intérieurs au christianisme. » (Ibid.)





Lettre de Simone Weil à Déodat Roché


« Je viens de lire chez Ballard votre belle étude sur l’amour spirituel chez les cathares. J’avais déjà lu auparavant, grâce à Ballard, votre brochure sur le catharisme. Ces deux textes ont fait sur moi une vive impression.
Depuis longtemps déjà je suis vivement attirée vers les cathares, bien que sachant peu de choses à leur sujet. Une des principales raisons de cette attraction est leur opposition concernant l’Ancien Testament, que vous exprimez si bien dans votre article, où vous dites justement que l’adoration de la puissance a fait perdre aux Hébreux la notion du bien et du mal. Le rang de texte sacré accordé à des récits pleins de cruautés impitoyables m’a toujours tenue éloignée du christianisme, d’autant plus que depuis vingt siècles ces récits n’ont jamais cessé d’exercer une influence sur tous les courants de la pensée chrétienne ; si du moins on entend par le christianisme les Eglises aujourd’hui classées dans cette rubrique. Saint-François d’Assise lui-même, aussi pur de cette souillure qu’il est possible de l’être, a fondé un Ordre qui à peine créé a presque aussitôt pris part aux meurtres et aux massacres. Je n’ai jamais pu comprendre comment il est possible à un esprit raisonnable de regarder le Yahvé de la Bible et le Père invoqué dans l’Evangile comme un seul et même être. L’influence de l’Ancien Testament et celle de l’Empire Romain, dont la tradition a été continuée par la papauté, sont à mon avis les deux causes essentielles de la corruption du christianisme.
Vos études m’ont confirmée dans une pensée que j’avais déjà avant de les avoir lues, c’est que le catharisme a été en Europe la dernière expression vivante de l’antiquité pré-romaine. Je crois qu’avant les conquêtes romaines les pays méditerranéens et le Proche-Orient formaient une civilisation non pas homogène, car la diversité était grande d’un pays à l’autre, mais continue ; qu’une même pensée vivait chez les meilleurs esprits, exprimée sous diverses formes dans les mystères et les sectes initiatiques d’Egypte et de Thrace, de Grèce, de Perse, et que les ouvrages de Platon constituent l’expression la plus parfaite que nous possédions de cette pensée. Bien entendu, vu la rareté des documents, une telle opinion ne peut pas être prouvée ; mais entre autres indices Platon lui-même présente toujours sa doctrine comme issue d’une tradition antique, sans jamais indiquer le pays d’origine ; à mon avis, l’explication la plus simple est que les traditions philosophiques et religieuses des pays connus par lui se confondaient en une seule et même pensée. C’est de cette pensée que le christianisme est issu ; mais les gnostiques, les manichéens, les cathares semblent seuls lui être restés vraiment fidèles. Seuls ils ont vraiment échappé à la grossièreté d’esprit, à la bassesse du cœur que la domination romaine a répandues sur de vastes territoires et qui constituent aujourd’hui encore l’atmosphère de l’Europe.
Il y a chez les cathares quelque chose de plus que dans l’antiquité, du moins l’antiquité connue de nous, quelques conceptions splendides, telles que la divinité descendant parmi les hommes et l’esprit déchiré, dispersé parmi la matière. Mais surtout ce qui fait du catharisme une espèce de miracle, c’est qu’il s’agissait d’unprocède pas d’une simple curiosité historique, ni même d’une simple curiosité intellectuelle. J’ai lu avec joie dans votre brochure que le catharisme peut être regardé comme un pythagorisme ou un platonisme chrétien ; car à mes yeux rien ne surpasse Platon. La simple curiosité intellectuelle ne peut mettre en contact avec la pensée de Pythagore et de Platon car à l’égard d’une telle pensée la connaissance et l’adhésion ne sont qu’une seule opération de l’esprit. Je pense de même au sujet du catharisme.
Jamais il n’a été si nécessaire qu’aujourd’hui de ressusciter cette forme de pensée. Nous sommes à une époque où la plupart des gens sentent confusément, mais vivement, que ce que l’on nommait au XVIIIe siècle les lumières constitue –y compris la science– une nourriture spirituelle insuffisante ; mais ce sentiment est en train de conduire l’humanité par les plus mauvais chemins. Il est urgent de se reporter, dans le passé, aux époques qui furent favorables à cette forme de vie spirituelle dont ce qu’il y a de plus précieux dans les sciences et les arts constitue simplement un reflet un peu dégradé. C’est pourquoi je souhaite vivement que vos études sur les cathares trouvent auprès du public l’attention et la diffusion qu’elles méritent. Mais des études sur ce thème, si belles qu’elles soient, ne peuvent suffire. Si vous pouviez trouver un éditeur, la publication de ce recueil de textes originaux, accessible au public, serait infiniment désirable. »

Publié avec l’autorisation de « Spiritualité cathare - hier, aujourd’hui, demain »
e religion et non simplement d’une philosophie. Je veux dire qu’autour de Toulouse au XIIe siècle la plus haute pensée vivait dans un milieu humain et non pas seulement dans l’esprit d’un certain nombre d’individus. Car c’est là, il me semble, la seule différence entre la philosophie et la religion, dès lors qu’il s’agit d’une religion non dogmatique.
Une pensée n’atteint la plénitude d’existence qu’incarnée dans un milieu humain, et par milieu j’entends quelque chose d’ouvert au monde extérieur, qui baigne dans la société environnante, qui est en contact avec toute cette société, non pas simplement un groupe fermé de disciples autour d’un maître. Faute de pouvoir respirer l’atmosphère d’un tel milieu, un esprit supérieur se fait une philosophie ; mais c’est là une ressource de deuxième ordre, la pensée y atteint un degré de réalité moindre. Il y a eu vraisemblablement un milieu pythagoricien, mais nous ne savons presque rien à ce sujet. A l’époque de Platon il n’y avait plus rien de semblable, et l’on sent continuellement dans l’œuvre de Platon l’absence d’un tel milieu et le regret de cette absence, un regret nostalgique.
Excusez ces réflexions décousues ; je voulais simplement vous montrer que mon intérêt pour le catharisme ne procède pas d’une simple curiosité historique, ni même d’une simple curiosité intellectuelle. J’ai lu avec joie dans votre brochure que le catharisme peut être regardé comme un pythagorisme ou un platonisme chrétien ; car à mes yeux rien ne surpasse Platon. La simple curiosité intellectuelle ne peut mettre en contact avec la pensée de Pythagore et de Platon car à l’égard d’une telle pensée la connaissance et l’adhésion ne sont qu’une seule opération de l’esprit. Je pense de même au sujet du catharisme.
Jamais il n’a été si nécessaire qu’aujourd’hui de ressusciter cette forme de pensée. Nous sommes à une époque où la plupart des gens sentent confusément, mais vivement, que ce que l’on nommait au XVIIIe siècle les lumières constitue –y compris la science– une nourriture spirituelle insuffisante ; mais ce sentiment est en train de conduire l’humanité par les plus mauvais chemins. Il est urgent de se reporter, dans le passé, aux époques qui furent favorables à cette forme de vie spirituelle dont ce qu’il y a de plus précieux dans les sciences et les arts constitue simplement un reflet un peu dégradé. C’est pourquoi je souhaite vivement que vos études sur les cathares trouvent auprès du public l’attention et la diffusion qu’elles méritent. Mais des études sur ce thème, si belles qu’elles soient, ne peuvent suffire. Si vous pouviez trouver un éditeur, la publication de ce recueil de textes originaux, accessible au public, serait infiniment désirable. »

Publié avec l’autorisation de « Spiritualité cathare - hier, aujourd’hui, demain »

 

lundi 23 octobre 2017

Retour au temps des Wisigoths quand Toulouse était la capitale d’un gigantesque royaume

Il y a 1 600 ans, Toulouse a été la capitale du royaume des Wisigoths, un territoire gigantesque par sa superficie puisqu'il s'étendait du sud la Loire au nord de l'Espagne. Récit.

Des vestiges du palais des Wisigoths de Toulouse ont été retrouvés lors de fouilles préventives menées en 1989 dans le cadre d’un projet immobilier. Cela s’est passé sur le site de l’ancien hôpital Larrey au centre-ville de Toulouse et aucun vestige n’a été sauvegardé. (©DR)
Coincée entre la période romaine et la période des Francs de Clovis, le temps des Wisigoths reste une période méconnue de l’histoire. Pourtant, ce peuple a bel et bien occupé notre territoire et il a notamment vécu à Toulouse à partir du Ve siècle après Jésus-Christ, pour une des périodes fastes de la ville.
À partir de 418, Toulouse devint en effet la capitale de ce royaume des Wisigoths, gigantesque par sa superficie puisqu’il s’étendait du sud la Loire jusqu’en Espagne.

Au cœur d’un royaume prospère

En 2015 l’historien Jean-Luc Boudartchouk rappelait à Actu Toulouse :
Toulouse est alors le cœur du royaume et à ce titre, l’activité économique s’y concentre. Les produits de luxe, les tissus et les denrées issues de l’agriculture transitent par elle. Arrivent aussi à Toulouse tous les matériaux importés depuis l’Afrique du Nord, contrôlés par les Romains. La ville vit sur l’agriculture et s’appuie sur un réseau de villas puissantes comme Montmaurin et Valentine, qui datent des Romains.
LIRE L’INTERVIEW COMPLÈTE DE L’HISTORIEN PARUE EN 2015 : Histoire. « À Toulouse, les rois Wisigoths ont recréé une Rome miniature »
Derrière les imposants remparts qui existaient au temps des Romains, les Wisigoths ont repris l’organisation romaine en y ajoutant quelques éléments.
Le royaume des Wisigoths au Ve siècle après Jésus-Christ :

Toulouse, une Rome miniature

Jean-Luc Boudartchouk avait développé le sens de cette organisation pour Actu Toulouse :
Avec Toulouse, ils ont recréé en fait une Rome miniature. Ils y ont regroupé le personnel administratif, essentiellement composé avec les personnes et les familles qui étaient aux commandes de la ville avant leur arrivée. La population locale a trouvé son intérêt dans cette organisation, car les Wisigoths ont apporté la stabilité et la sécurité militaire, ce qui manquait dans la période précédente.
Les Wisigoths se réservaient quant à eux l’aspect militaire et la collecte des impôts.
L’historien Georges Labouysse parle de Toulouse au temps des Wisigoths (source : Toulouse Infos) :

Après les Wisigoths, Toulouse recule dans la hiérarchie

Cette prospérité va durer jusqu’en 508, date à laquelle les Francs reprennent la ville.
« La ville se retrouve alors en marge d’un nouveau royaume, ce qui ne fait plus d’elle une place forte, mais juste un poste avancé », dixit Jean-Luc Boudartchouk. « L’habitat est plus clairsemé et seule l’enceinte est bien entretenue. Toulouse perd des habitants et se ruralise. Les Francs sont moins romanisés que les Wisigoths et abandonnent ensuite le tout-à-l’égout. Toulouse ne disparaît pas, mais elle ne fait plus partie des routes commerciales majeures et passe derrière d’une ville comme Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme), qui devient très dynamique. Elle n’est plus une cité majeure au Haut Moyen-Âge et il faudra attendre les premiers comtes de Toulouse au XIe siècle pour que la ville retrouve un dynamisme économique et urbain ».
Les Wisigoths ont laissé des traces de leur passage à Toulouse. Mais celles-ci ont été détruites par les bulldozers à l’occasion de la destruction de l’ancien l’hôpital Larrey en 1989, hôpital qui se trouvait près de Saint-Pierre, sur l’emplacement de ce que les historiens ont estimé être le Palais des Wisigoths.
Les écologistes ont demandé que l’année 2018 soit l’année des Wisigoths à Toulouse
Le 12 octobre 2017, en conseil municipal, les élus écologistes ont formulé un vœu « pour que l’année 2018 soit dédiée à la création du royaume Wisigoth de Toulouse ». Il expliquent : « L’histoire de France ignore en général l’apport culturel et historique du royaume Wisigoth de Toulouse, qui fut pourtant au Ve siècle comme le plus vaste « État » d’Europe. Or, en 2018, nous célèbrerons le 16e centenaire du traité conclu entre l’empereur romain Flavius Honorius et Wallia, le roi des Wisigoths. Voici bientôt 1 600 ans en effet que le foedus de 418 reconnut à ces Goths le statut de peuple fédéré de l’empire romain et leur confia l’administration et la protection de plusieurs provinces au sud de la Loire ».
Forts de ce récit, les Verts ont proposé « qu’une exposition temporaire spécifique soit mise en place au musée Saint-Raymond de Toulouse et que des manifestations puissent être élaborées en partenariat avec la communauté universitaire et les services archéologiques ». Ce vœu a été voté à l’unanimité, même si selon toute vraisemblance un calendrier serré ne permettra pas d’organiser une exposition en 2018. « Le maire de Toulouse, Jean-Luc Moudenc s’est engagé lors de ce même conseil à ce qu’il y ait une exposition sur les Wisigoths avant 2020 », a cependant indiqué Régis Godec, élu du groupe Toulouse Vert Demain.

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a voir absolument :http://www.elishean.fr/le-catharisme-apogee-spirituelle-de-la-civilisation-occultee-des-wisigoths-contre-le-mythe-franco-gaulois/

mardi 26 septembre 2017

Napoléon Peyrat (1809-1881)


Napoléon Peyrat (1809-1881)

Napoléon Peyrat (1809-1881)

Napoléon Peyrat est un « enfant » de l’Ariège protestante dont il a retracé, en français ou en langue d’Oc, l’histoire, les traditions, la vitalité. Ses travaux, sur le protestantisme français au temps du Désert (1685-1791) et sur les Cathares ont eu un rayonnement important. Pasteur, il a exercé son ministère à Saint-Germain-en-Laye et a été, dans cette fonction, témoin du siège de Paris par l’armée allemande en 1870-71.

L'apprentissage

  • Napoléon Peyrat
    Napoléon Peyrat © Association Les Amis de Napoléon Peyrat
  • Bordes sur Arize, Ariège
    Bordes sur Arize, Ariège © Bernard Guttinger

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Napoléon Peyrat est né le 20 janvier 1809 aux Bordes sur Arize, un petit village de l’Ariège protestante situé non loin du Mas d’Azil et du Carla-Bayle. Son grand père, bonapartiste, est le maire du village. Sa mère meurt très jeune et il est élevé par ses tantes.
En 1823, il poursuit son éducation dans une institution que le pasteur Jacques Rosselloti dirige à Chatillon-sur-Seine.
En 1826, il commence des études de théologie à la Faculté de Montauban qu’il achève en 1831 en rédigeant une thèse sur le Christianisme au XIXe siècle. Il en dégage des questions pratiques et théologiques qui le dissuadent provisoirement de s’engager dans un ministère pastoral. Il devient précepteur dans des familles protestantes, d’abord à Paris, puis à Bordeaux.

L'historien des minorités

  • Livre Histoire Pasteurs du Désert par Napoléon Peyrat
    Livre Histoire Pasteurs du Désert par Napoléon Peyrat © Collection privée
Outre l’enseignement, il s’engage dans des recherches sur l’histoire des minorités protestantes en France ainsi que sur celle des Cathares qui ont été persécutés par l’inquisition dans sa province natale et fait entendre (souvent dans un style passionné) la parole de ceux qui ont été vaincus, les camisards d’une part, les albigeois retranchés à Montségur d’autre part.
En 1842, il publie une histoire des pasteurs du Désert qui s’étend de la Révocation de l’Édit de Nantes aux débuts de la Révolution française.

Le pasteur

  • Temple de Saint Germain-en-Laye (Yvelines)
    Temple de Saint Germain-en-Laye (Yvelines) © cartesfrance.fr
En 1844, il est nommé pasteur auxiliaire de la Paroisse de Saint-Germain-en-Laye. Consacré en 1847, il en devient le pasteur titulaire en 1854, après s’être marié, en 1851, avec l’une des nièces du maréchal Randon, Eugénie Poiré, sensiblement plus jeune que lui.
Dès lors, Napoléon Peyrat partage son temps entre ses activités pastorales et ses charges familiales. C’est lui qui fait édifier le temple de Saint-Germain-en-Laye en 1862. Mais il garde pour la recherche en histoire une grande attirance. Profitant de sa présence à Saint-Germain, il rédige une importante étude sur le Colloque de Poissy (1561). De plus, il engage une recherche sur Vigilance qui a réformé le christianisme en Pyrénées au Ve siècle. Vigilance, lui, semble avoir été un précurseur de Luther.
Le déroulement de la guerre de 1870 place, bien malgré elle, la paroisse de Saint-Germain-en-Laye dans une position stratégique : après la défaite de Sedan, l’armée allemande se déploie autour de Paris. C’est pourquoi le temple est souvent requis par les allemands pour y célébrer un culte. Napoléon Peyrat et son épouse sont plusieurs fois intervenus auprès des officiers allemands pour éviter des situations absurdes et des violences. Napoléon Peyrat a noté les différents événements de ce siège dans un journal très intéressant, d’autant plus qu’il y fait les portraits très vivants de tel ou tel officier ou pasteur.
Mais curieusement, et bien que la Commune ait commencé pendant le Siège de Paris, il n’y fait absolument aucune allusion.

Le poète

Tout au long de sa vie, Napoléon Peyrat a écrit des poèmes inspirés qui évoquent l’horreur des persécutions. Il les écrit tantôt en langue d’oc, tantôt en français pour montrer son attachement à la République. C’est pour cette raison que, admis en 1877 au sein de l’association du Félibrige (créée autour de Frédéric Mistral), il se rallie aux Félibriges rouges, plus ouvertement républicains.
Napoléon Peyrat a aussi rédigé des Chroniques sur la paroisse de Saint-Germain-en-Laye, encore inédites.
C’est à Saint-Germain-en-Laye que Napoléon Peyrat est mort le 4 avril 1881.

Emmurements dans les grottes de la Haute Ariège

Emmurements dans les grottes de la Haute AriègeRené Bodin


Sur près de deux siècles, cinq idées tournant autour d'un mot constant, développées par cinq auteurs distincts ont été reprises par des centaines d'écrits et ont pour cadre Lombrives et sa multitude de grottes avoisinantes.

Le dictionnaire définit le mot emmurement comme étant le fait d'être derrière les murs, c'est-à-dire prisonnier.

L'homme seul dans sa geôle est emmuré. L'homme enterré vivant dans une fosse est aussi placé derrière un mur définitivement. L'homme enfermé derrière un mur dans une partie d'un réseau souterrain se trouve aussi prisonnier pour l'éternité.

Le premier texte, évoquant un emmurement dans les grottes est celui-ci :

  • "En 1802, la contrée était peu sûre. Une bande de brigands, dévalisait sans cesse les commerçants de Tarascon sur Ariège ou les agriculteurs qui rentraient de leur marché hebdomadaire. La police, appelée suite à de nombreuses plaintes, fit une enquête. Au bout de quelques jours de recherche, elle se rendit compte que les brigands dévastateurs du pays habitaient la Grotte de Lombrives. Le renfort de l'armée fut obtenu et, le colonel de Beaumont, envoya ses soldats vers l'immensité souterraine. Les militaires entrèrent dans la Grotte, parcoururent la galerie de "la Carène" et n'apercevant âme qui vive, arrivèrent près d'une étroite chatière. A plat ventre, un à un, 250 soldats pénétrèrent dans le boyau. Deux heures après, personne n'était revenu et pas le moindre bruit ne ressortait des entrailles de la terre. Le colonel de Beaumont se dit : "Il se passe quelque chose d'étrange dans Lombrives !" Il envoya sur le champ deux soldats vers l'étroite chatière et, demanda au second de tenir fermement le pied de son compagnon. Les militaires exécutèrent l'ordre, et, celui resté le plus en aval du passage, se rendit compte brusquement du raidissement du corps de son prédécesseur et rapidement recula. Le colonel de Beaumont comprit de suite ce qui se passait et fit murer sur le champ l'étroit passage. Plus personne ne pourrait aller plus loin dans la grotte maudite, et surtout, plus personne ne pourrait en sortir ; le pays allait donc pouvoir revivre !

    Cinq jours après, alors que tout le monde parlait de la disparition de ces 250 soldats, le receveur des impôts de Foix, arrivant à son bureau le matin, trouva tout dévasté et un écriteau qui portait une mention : "les brigands de la grotte de Lombrives !"

    Cela signifiait donc qu'il y avait d'autres entrées à la grotte de Lombrives. Le Colonel de Beaumont envoya immédiatement deux régiments sur la montagne de Lombrives. Les militaires patrouillèrent, cherchèrent, firent le guet. Au bout d'une semaine, d'un modeste abri sous roche, un bruit de pierres déplacées se fit entendre et les soldats aperçurent un homme se camouflant dans les taillis. Rapidement les soldats le capturèrent, tandis que d'autres s'engouffrèrent, à partir d'un modeste abri sous roche, vers cette entrée jusqu'alors inconnue. A la suite d'une longue marche dans la pénombre, ils aperçurent dans le lointain, éclairés par des torches, des hommes qui festoyaient. Il ne pouvait s'agir que des brigands. Les soldats prirent leurs fusils, tirèrent, les tuèrent tous.

    A l'aide des échelles de bois qui, de la "Cathédrale", permettaient de regagner les étages supérieurs de la grotte de Lombrives, les soldats descendirent dans l'immense salle. Là, près de l'étroit passage, ils trouvèrent, à droite les têtes de leurs malheureux compagnons, à gauche leurs corps, au milieu la hache qui servit à ce carnage ! Ce passage s'appelle depuis le "Pas du Crime" !"
Cette histoire connue sous l'appellation "la Légende des brigands de Lombrives", elle est due au journaliste de la Mosaïque du Midi Jules Mettmant, a été reprise par le Docteur Paul Guittard et daterait de 1830. Personne n'a pu établir son fondement historique et ce n'était probablement qu'une histoire de brigands ! Dans Souvenirs d'Ussat, publiés par le Docteur Guittard en 1869, une large place de l'écrit est consacrée à cette légende. Elle sera maintes fois publiée, notamment sous forme de bande dessinée dans le journal France Soir 1 et eut les honneurs du 1er numéro du journal l'Ariégeois en 1979.

- La "Cathédrale" de la grotte de Lombrives (photographie : fonds de Lombrives) -


Plus tard, en 1884, Félix Garrigou apportera une explication à l'abondance des ossement trouvés par son père (Adolphe Garrigou) et ses contemporains (Noulet, Boubée, Marty, etc...) :
  • "Rappelons-nous un fait historique signalé par César dans ses Commentaires, renouvelés presque d'une manière semblable en Afrique par le général Bugeaud à l'égard des Arabes. César nous dit (et avec lui l'historien Fleurus), qu'il fit périr dans les grottes où ils s'étaient réfugiés, les habitants des vallées pyrénéennes qui lui résistaient.

    Il ne semble pas trop téméraire de tirer de là une conclusion explicative des observations faites au cimetière et de dire :

    Le gisement du cimetière de la grotte de Lombrives, paraîtrait constitué par les restes d'une population historique, préromaine, composée surtout de femmes et d'enfants qui se seraient réfugiés au moyen d'échelles dans ce point de la caverne pour y être en sûreté pendant quelques temps à l'époque de l'invasion romaine. Les Romains, avertis et ayant eu connaissance de cette retraite, auraient enlevé aux réfugiés tout moyen de redescendre les escarpements.

    La mort survenue soit par la famine, soit par la frayeur, aurait été pour tous ces réfugiés la conséquence de la cruauté de César."
Vivien de Saint Martin, auteur du Dictionnaire de géographie universelle écrit dans son monumental ouvrage qu'il s'agit d'ossements d'une ancienne peuplade qui aurait été poussée dans la grotte de Lombrives par l'eau du Déluge.

La préhistoire sortant de ses balbutiements, pour Félix Régnault, ces ossements seraient ceux d'une peuplade préhistorique emmurée vivante.

L'emmurement des Cathares dans Lombrives est décrit dans l'un des chapitres du tome III ("Les Albigeois et l'Inquisition") de l'Histoire des Albigeois de Napoléon Peyrat.
  • C'est ici que doit, selon toute apparence s'intercaler dans nos récits la catastrophe d'Ornolac. Mais comment rendre au jour ce drame obscur , perdu depuis plus de cinq cents ans, à deux mille mètres dans les profondeurs de la terre, et dont il ne reste plus d'autre témoignage qu'un muet amas d'ossements à demi pétrifiés...

    ... Depuis le jour où le pieux Loup de Foix venait prier dans la grotte d'Ornolac, cette grotte célèbre, séjour d'un évêque albigeois et siège de prédications nocturnes, était devenu, sous l'orage toujours croissant, un refuge perpétuel de faidits des bois. Cinq ou six cents montagnards, fugitifs de leurs hameaux, s'étaient établis, hommes, femmes, enfants, dans ces ténèbres et formaient, autour du pasteur cathare, un mélange de colonie mystique, de camp sauvage. Un nouveau Montségur s'était organisé, non plus chevaleresque comme l'autre, et perché dans les nuées, mais rustique au contraire, et perdu dans un antre de montagne, un gouffre perforé par un torrent diluvien.

    L'Inquisition, plus audacieuse par l'absence des comtes de Foix qui résidaient dans le Béarn, et par la conversion des seigneurs de Castelverdun, possesseurs du territoire d'Ornolac, résolut de détruire ce repaire de faidits...

    ... Le Sénéchal pénètre sous le vaste porche, force l'étroit goulot intérieur, et croit les envelopper tous d'un coup de filet, comme un nid de bêtes fauves, dans un fonds de tanière, sous la rotonde sans issue de Loup de Foix. Mais la grotte est double, ou plutôt le corridor oriental qu'il venait de parcourir, d'une étendue d'un quart de lieue, n'est que le vestibule d'une galerie supérieure trois fois plus profonde qui forme la caverne-mère.

    On gravit celle-ci par un escarpement d'une hauteur perpendiculaire de quatre-vingts pieds, vertical mais divisé par cinq ou six ressauts, dont les entablements supportent des échelles de bois dressées contre le rocher. Les cathares, retirant après eux les échelles, furent en un instant inexpugnables dans l'obscurité de leur aire souterraine. L'ost catholique, qui croyait les acculer dans l'impasse de la Rotonde, y fut lui-même transpercé, écrasé, foudroyé, par un orage de flèches sifflantes, de rocs bondissants et de hurlements sauvages, roulant de cette gueule sombre qui, selon les géologues, vomit le torrent océanien. Comment, sous cette tempête, tenter l'escalade; et, parvenu sur la haute corniche, comment poursuivre les faidits dans le dédale obscur de la caverne qui s'enfonce encore de trois quarts de lieue dans la montagne de Sabart ? Le sénéchal recula, ramassa ses morts, mura l'étroit goulot oriental et scella les cathares vainqueurs dans leur fort devenu leur tombeau. Il campa quelques jours encore sur la bouche de la caverne, au-dessus de l'Ariège, puis, quand il n'entendit plus rien remuer dans les entrailles de la roche, pensant que tout était fini, il redescendit tranquillement et s'en revint à Toulouse.

    Cependant, que se passait-il au-dedans ? Les faidits essayèrent-ils de renverser le mur ? L'exiguïté du goulot rendait impossible l'évasion comme l'invasion du rocher. La résignation est une vertu cathare; ils se soumirent doucement à leur sort et sourirent tristement de leur tombeau. Frugivores, longs jeûneurs, s'imposant volontiers l'endura qu'ils gardaient pour leurs dernières douleurs, ils acceptèrent tranquillement ce supplice de la faim, leur suicide habituel et religieux. Dans aucun cas on ne peut supposer qu'ils s'entre-dévorèrent dans les ténèbres. Ils ressentaient la plus invincible horreur pour les repas d'Hugolin. Que firent-ils donc ? Ils vécurent encore quelque temps: ils avaient des pots d'argile, des amas de légumes dans les creux de rochers et, non loin de là, un petit lac d'eau pure. Mais un jour tout leur manqua: vivres, bois, feu et la lumière si douce, ce reflet visible de la vie. Alors ils se groupèrent, selon leurs familles, dans les divers compartiments, l'époux à côté de l'épouse, la vierge à côté de la mère défaillante, et le petit enfant sur sa mamelle tarie. Pendant quelques instants, au-dessus du pieux murmure des prières, s'entendit encore la voix du ministre cathare, confessant la Parole qui était en Dieu et qui était Dieu. Le fidèle diacre donna aux mourants le baiser de la paix et s'endormit à son tour. Tous, reposaient dans le sommeil et les gouttes d'eau qui tombaient lentement des voûtes troublèrent seules le silence sépulcral pendant des siècles. Ainsi probablement finirent ces derniers enfants du Paraclet. Pendant que l'Inquisition maudissait leur mémoire, que leurs proches même n'osaient prononcer leur nom, ils étaient pleurés dans les rochers. La montagne qui, comme une tendre mère, les avait recueillis dans son sein, leur fila religieusement avec ses larmes un blanc suaire, ensevelit leurs restes sacrés dans les plis lentement tissés dans ce linceul calcaire, et sculpta sur leurs os que ne profana point le vers, un mausolée triomphal de stalagmites, merveilleusement orné d'urnes, de candélabres et de symboles de vie. (Napoléon Peyrat, pages 357 à 360).

    "Jacques de Castelverdun était seigneur d'Ornolac et de sa grotte sinistre, scellée depuis deux siècles et demi. Le temps à cette époque, rouvrit ce grand ossuaire albigeois. Les protestants, qui peut-être se cherchaient des ancêtres dans les antres des montagnes, conduits par de vagues et tragiques souvenirs, pénétrèrent dans ces cryptes funéraires. Ils entrent, ils arrivent à l'oratoire de Loup de Foix, montent par les échelles encore dressées, à la grotte supérieure, et découvrent, ô prodige effrayant, tout un peuple endormi et couché, presque pétrifié lui-même comme dans des cercueils de pierre. La montagne, qui pleurait ses enfants depuis trois siècles, leur avait construit, de ses larmes congelées, des tombes de stalagmites. Bien plus, elle leur avait élevé comme un monument triomphal et transformé l'affreuse caverne en une basilique merveilleusement décorée de moulures, de sculptures symboliques. On y voyait une chaire, des candélabres, des urnes; puis des ornements sacerdotaux, un pallium, des tiares; puis encore des fruits répandus autour de ces morts, des melons et des champignons, emblèmes de vie; et enfin une cloche de bronze, dont l'énorme capsule, comme tombée de sa voûte, gisait à terre, symbole d'éternel silence et signe en même temps de la victoire remportée par ces martyrs sur le Prince de l'air dont le clairon muet décorait leur caveau sépulcral..." (Napoléon Peyrat, pages 403-404).
Les écrits de Napoléon Peyrat seront vulgarisés par un jeune écrivain Allemand, Otto Rahn, avant la Dernière Guerre Mondiale dans un ouvrage : Croisade contre le Graal (page 311) :
  • "...Si les murs de la grotte fortifiée de Bouan, la plus forte du Sabarthès, et qui appartenait aux sires de Château-Verdun, avait tenu bon jusqu'alors, il est probable qu'ils furent éventrés à coups de catapultes retentissantes après la disparition de Pons-Arnaud. Et les derniers cathares restant dans les connues d'eux seuls s'enfuirent vraisemblablement sur les montagnes, d'où ils pouvaient émigrer vers des campagnes plus hospitalières, où le soleil brille plus pur, parce qu'il n'est obscurci par la fumée d'aucun bûcher, et où les étoiles, ces étoiles auxquelles ils aspiraient, sont plus proches. Avant d'abandonner définitivement les grottes qui leur avaient si longtemps donné asile, à eux les faidits libres comme l'air, l'un d'eux laissa sur les parois quelques dessins et inscriptions :
    Un arbre de vie.
    Une colombe, emblème du Dieu-Esprit.
    Un poisson, symbole de la Divinité-Lumière.
    Des monogrammes du Christ, en lettres grecques ou romanes.
    Le mot de "Gethsemané".

    A tous les endroits, souvent presque introuvables, ou une galerie monte en lacets, à travers la roche calcaire, vers les sommets inondés de soleil, il a dessiné, avec de savantes fioritures, le paraphe GTS, probablement une abréviation du mot Gethsemané, le jardin où le Christ fut, par trahison, livré à ses bourreaux...

    Lorsqu'on essaye de monter, par une cheminée de ce genre, vers les hauteurs où l'attrait de la liberté exerçait une fascination sur les cathares, on est souvent arrêté net par des murs ou d'imposants blocs de rochers, stalactites dont l'eau calcaire, par son suintement continu, a fait une infranchissable barrière. Là, les persécutés déjouaient toutes les poursuites des Inquisiteurs et de leurs chiens dressés à chasser l'hérétique. Personne jusqu'à ce jour n'a réussi à dévoiler le mystère qui dort derrière ces murs de stalactites. Une légende pyrénéenne prétend que les derniers cathares auraient été emmurés là par les moines dominicains, désespérant de les capturer dans leurs réduis inaccessibles. Jusqu'à maintenant les montagnes du Sabarthès n'ont toujours pas livré leur secret."


- Otto Rahn, écrivain allemand, devant les inscriptions de la "Cathédrale" -
(photographie extraite du Fonds Boudou©)


Il semble que se soit le premier texte qui évoque l'incendie des spoulgas, incendie qui sera évoquée par la suite dans de nombreux écrits. La tradition orale véhicule l'existence de cheminées qui de la spoulga de Bouan "remonteraient" sur la montagne ou inversement de d'entonnoirs, de puits qui absorbent les eaux des violents orages de la saison estivale (témoignages de plusieurs personnes de Bouan ou de Larnat). Ces galeries sont évoquées dans l'article publié par Alex Coutet (La Dépêche du Midi 13 mai 1932)

Est-ce une réalité ou le fruit de l'imagination ? Les spéléologues qui ont étudié la spoulga ont eu connaissance de cette tradition, mais n'ont jamais pu localiser une quelconque communication, si ce n'est quelque galerie permettant de s'élever d'une quarantaine de mètres...

Pour Otto Rahn (Croisade contre le Graal, page 197), l'explication en est simple: "Malheureusement, nous ne connaissons qu'une petite partie de leurs galeries inextricables et de leurs salles. Partout des murailles, transformées par le suintement millénaire des eaux calcaires en véritables falaises, tiennent cacher le secret qui dort derrière leur épaisseur".


Des galeries colmatées ou fossiles sont nombreuses dans la grotte de Lombrives ou dans les grottes voisines (Porche de la Grande Arche, Galerie Galy, porche de la grotte de Sainte Eulalie, porche de la grotte des Ateliers, porche de la grotte des Chevaliers), elles résultent soit de sédimentation calcaire (coulées et planchers stalagmitiques), soit par des remplissages de matériaux exogènes (argiles, sables, graviers, galets) ; parfois les deux phénomènes géologiques se combinent.

Les hommes ont parfois sciemment fermé des grottes ainsi J.-B. Noulet écrivait en 1882 dans son Etude de Lombrives ou grande caverne d'Ussat :
  • "La grotte funéraire de Sinsat ou de Camouzeille, non loin d'Ussat, que j'ai fait connaître dans les mémoires de l'Académie des Sciences de Toulouse était murée. On peut supposer que les grandes entrées de l'Ombrives, comme celle de l'Herm, etc, furent aussi murées jusqu'à une élèvation que ne pouvaient franchir les animaux que l'on avait à redouter. Certaines de ces entrées, entre autres celle de Fontanet, présentent des restes de murs secs, régnant encore sur toute leur longueur."
Ces différents textes montrent bien qu'il n'est pas utopique de penser que les diverses grottes de la vallée de l'Ariège, fréquentées par les hommes depuis la nuit des temps, aient pu servir à faire disparaître des groupuscules humains ou à les isoler dans une demeure d'éternité, dans ce cas il conviendrait de parler de ces grottes comme grottes sépulcrales.

Un seul texte, à notre connaissance, parle d'emmurement d'hommes en Haute Ariège, il s'agit de trois habitants de Quié : Guillaume de l'Aire, Jacques Tartier, Raymond et Pierre Peyre furent emmurés un certain temps à Carcassonne (déposition de Raymond de Laburat, vers 1310). Mais cela c'est une autre histoire...

René Bodin

LOS CATAROS DE MONTSEGUR - LOS MARTIRES DEL PURO AMOR - VIDEOCLIP CONSOL...

A MONSEGURE 220 Cathares ont brulés


  LOS CATAROS DE MONTSEGUR - LOS    MARTIRES DEL PURO AMOR -                                                       
A MONSEGURE 220 Cathares ont brulés par l'intolerance de la Papotée, des moines Cisterciens, Dominicains ,et des moines Franciscains
                              
                                                                               

                                          THE OCCITAN GENOCIDE

                                EL GENOCIDE OCCITÀ
                                                                     

the assasins who ask for their forgiveness 800 years later

                                             oil by claude Dubois museum Arques city

mardi 23 mai 2017

Pédophilie dans l'Eglise

Pédophilie dans l'Eglise: l'archevêque d'Auch cité à comparaître en septembre par des victimes
Pédophilie dans l'Eglise: l'archevêque d'Auch cité à comparaître en septembre par des victimes
L'archevêque d'Auch, Maurice Gardès, le cardinal Philippe Barbarin et cinq autres personnes sont cités à comparaître en septembre devant le tribunal correctionnel de Lyon par des victimes d'agressions sexuelles au sein de l'Eglise. 

Paroisse Magno
   voir les moines et les bonnes sœurs:<iframe src="https://www.facebook.com/plugins/video.php?href=https%3A%2F%2Fwww.facebook.com%2F1564607413802994%2Fvideos%2F1855903648006701%2F&show_text=1&width=560" width="560" height="540" style="border:none;overflow:hidden" scrolling="no" frameborder="0" allowTransparency="true"></iframe>

dimanche 7 mai 2017

Tidiane N'Diaye - Le Génocide Voilé ou La Traite Négrière Arabo-Musulmane.


 

Ajoutée le 24 janv. 2013
Le Génocide Voilé (aux éditions Gallimard Paris)
« Les Arabes ont razzié l'Afrique pendant treize siècles sans interruption. La plupart des millions d'hommes qu'ils ont enlevés et déportés ont disparu du fait des traitements inhumains. Cette douloureuse page de l'histoire des peuples Africains n'est apparemment pas définitivement tournée. Le "Grand Désastre" a commencé lorsque l'émir et général arabe Abdallah Ben Saïd a imposé aux Soudanais un bakht (accord), conclu en 652, les obligeant à livrer annuellement des centaines d'Africains ensuite esclavagisés par les Arabes. La majorité de ces femmes, hommes et enfants était prélevée sur les populations du Darfour. Et ce fut le point de départ d'une énorme ponction humaine qui devait s'arrêter officiellement au début du XXe siècle. »

Ecrivain --Anthropologue- Economiste (docteur en Economie), Tidiane N'Diaye a mené une longue carrière de Chargé d'Etudes à l'I.N.S.E.E. (Institut National de la Statistique et des Etudes Economiques), Professeur d'économie descriptive et Directeur de Recherches à Sup de Co Caraïbes. Il est l'auteur de nombreuses études économiques et sociales sur les départements français d'Amérique. Egalement Anthropologue de réputation mondiale, Tidiane N'Diaye a publié de nombreux Essais sur des thèmes liés à l'histoire des civilisations négro-africaines et leurs diasporas qu'il tente de mieux faire connaître dans leurs dimensions historique et culturelle.
Tidiane N'Diaye est le premier chercheur africain dont les travaux (Traite négrière arabo-musulmane, Le génocide voilé, à propos de la traite arabe) ont été nominés au Prix Renaudot de l'essai en 2008. Il est membre du jury du prix littéraire La Mamounia.

jeudi 16 mars 2017

combattants-huguenots-au-coeur-revoltes-cevenoles


                                                                                     
ces-combattants-huguenots-au-coeur-revoltes-cevenoles-du-xviiie-siecle

Entre 1702 et 1704, des Protestants des Cévennes, paysans et artisans animés d’un mysticisme prophétique et apocalyptique, menèrent une guérilla sans merci contre l’armée du Roi-Soleil. Ils réclamaient leur liberté de culte et de conscience.

Paysages des Cévennes et documents d’archives, entretiens de spécialistes, extraits du film éponyme de René Allio ou du spectacle La Nuit des Camisards, font revivre ces grands moments oubliés de l’Histoire.


CAMISARDS
Les guérilleros de la foi

                             
http://france3-regions.francetvinfo.fr/occitanie/emissions/doc-24-midi-pyrenees-et-languedoc-roussillon/camisards-ces-combattants-huguenots-au-coeur-revoltes-cevenoles-du-xviiie-siecle-1211423.html